Le taux de pénétration du streaming musical payant reste peu élevé en France
Avec un taux de pénétration du streaming sur abonnement de 18 % chez les plus de 10 ans, et de seulement 11 % chez les plus de 54 ans, la France reste en queue du peloton des pays les plus avancés.
Plus de quatre Français sur dix écoutent de la musique en streaming désormais, soit 24,6 millions de personnes, dont 11 millions d’abonnés à des comptes premium et 5 millions à des comptes familiaux ou duos. Leur nombre a progressé de 12,5 % sur un an en 2022 (soit 2,6 millions d’auditeurs de plus, dont un million de nouveaux abonnés), et ils ont totalisé 111 milliards d’écoutes, soit deux fois plus qu’il y a quatre ans. Mais le taux de pénétration de l’abonnement en France, qui a représenté 76 % des revenus du streaming pour les labels l’an dernier, et 56 % de leur chiffre d’affaires brut global, reste très inférieur à ce qu’il est sur d’autres marchés, et pas nécessairement les plus développés.
“En dépit de la prédominance de ce mode de consommation, l’adoption massive du streaming par abonnement à travers le monde se transpose plus lentement en France”, confirme le SNEP (Syndicat national des éditeurs phonographiques) dans son dernier rapport annuel sur la production musicale française en 20221. Alors que le taux de pénétration l’abonnement est de 29 % aux Etats-Unis, avec 92 millions d’abonnés2, il n’est que de 18 % en France chez les plus de 10 ans.
Dans un histogramme des plus forts taux de penétration de l’abonnement au streaming dans le monde publié par le SNEP, la France n’occupe que le 17ième rang : devant le Japon et la Pologne ; mais derrière l’Italie et l’Espagne ; et aussi le Nigeria, l’Argentine, le Brésil, ou encore le Mexique, qui se classe en 4ième position. Le trio de tête est composé de la Suède, du Royaume Uni et des Etats-Unis. L’Allemagne (5ième rang), l’Australie (6ième) ou encore le Canada (8ième) se classent également devant la France.
Une forte marge de progression potentielle
Ce nouveau mode de consommation de la musique séduit certes les plus jeunes. Les 16 - 34 ans représentent 53 % des abonnés en France, selon le SNEP, soit 8,4 millions d’abonnés, quand ils ne pèsent que 29 % de la population - soit 15,9 millions de personnes selon l’Insee3, et un taux de pénétration de l’abonnement de 47 % dans cette tranche d’âge, qui laisse encore une belle marge de progression. Mais il peine à séduire les séniors de plus de 55 ans.
Ces derniers représentent 41 % de la population, soit 23 millions de personnes selon l’Insee, mais seulement 16 % des abonnés - c’est à dire 2,5 millions d’abonnés, et un taux de pénétration de l’abonnement de 11 % à peine chez les plus âgés. C’est certainement le signe d’un défaut de segmentation de l’offre à destination de ce public, au pouvoir d’achat et au consentement à payer pourtant plus élevés4.
La marge de progression de l’abonnement reste très importante, également, chez les 35 - 54 ans, qui pèsent 30 % de la population française, soit 17,2 millions de personnes selon l’Insee, et 31 % des abonnés selon le SNEP, c’est à dire 4,9 millions d’abonnés. Cela donne un taux de pénétration de l’abonnement de 28,8 % dans cette tranche d’âge, qui est encore appelé à fortement progresser.
Des ventes physiques de nouveau en repli
La croissance continue des revenus du streaming d’une année sur l’autre (+ 12,7 % en 2022, à hauteur de 486 millions d’euros) a permis au marché de gros français de la musique enregistrée de connaître six années consécutives de croissance. En incluant les droits voisins (redevances en provenance des médias et des lieux sonorisés), en hausse de 12 % sur un an à 122 millions d’euros, ainsi que la synchronisation (+ 34 % à 32 millions d’euros), les revenus des labels ont atteint 920 millions d’euros en 2022 (+ 6,4 % sur un an), dont 766 millions d’euros pour les seules ventes physiques et numériques (+ 4,7 % sur un an).
En dehors du vinyle, dont les ventes ont progressé de 13,1 % l’an dernier, à hauteur de 89,1 millions d’euros, le rebond spectaculaire du marché physique en 2021 (+ 21 % en valeur sur un an) n’a pas eu de suite. Les ventes physiques se sont repliées de 11,8 % en 2022, passant sous la barre des 200 millions d’euros, avec des ventes de CD en recul de 25,4 %, à seulement 103,9 millions d’euros. La progression du numérique a néanmoins permis au marché de gros français de retrouver son niveau de 2007, indique le SNEP, qui relativise cependant cette performance dans son rapport : “Ce retour à la croissance ne doit pas occulter le fait que le marché 2022 n’est qu’à 52% du pic historique de 2002”.
Au contraire des données publiées par la RIAA (Recording Industry Association of America) aux Etats-Unis, cette estimation du SNEP ne tient pas compte de l’inflation. Ajustés d’une inflation cumulée de 35,4 % dans l’intervalle , selon le calculateur de france-inflation.com5, les 1,48 milliard d’euros du marché de gros de 2002 équivaudraient à 2 milliards d’euros d’aujourd’hui. Et les ventes de musique de 2022 en France ne pèseraient que 38 % de celles de 2002. Quand à l'inflation de 4,5 % constatée en 2022, elle annule presque leur progression de 4,7 % sur un an.
Population par sexe et groupe d'âges en 2023, Insee, mis à jour le 17 janvier 2023
Niveau de vie médian selon l’âge en 2019, Insee-DGFiP-Cnaf-Cnav-CCMSA, enquête Revenus fiscaux et sociaux, 7 octobre 2021
La raison de cette faiblesse française est à rechercher dans les débuts catastrophiques de DEEZER appuyé par Orange : ils ont tué le marché du payant en donnant tout gratuitement, en proclamant que la musique se fait gratuite et autres conneries. Ils ont massacré aussi le marché de leurs concurrents, tout cela pour aboutir à quoi ? A un échec couteux pour eux et destructeur de valeur pour les concurrents et le métier de la musique en France 15 ans plus tard. Je l’ai dit et dénoncé déjà à l’époque.