La Russie mise au ban de la communauté musicale internationale
De nombreux acteurs de l'industrie musicale ont cessé toute relation commerciale avec la Russie, voire fermé leurs bureaux dans le pays, qui se retrouve partiellement coupé du juke-box planétaire.
Les trois majors de la musique - Sony Music, Universal Music et Warner Music - ont annoncé cette semaine cesser toute relation commerciale avec la Russie suite à son invasion militaire de l’Ukraine. "À compter d'aujourd'hui, nous suspendons toutes les opérations en Russie et fermons nos bureaux dans ce pays”, a confirmé Universal Music à Variety le 8 mars, précisant que les salariés de la compagnie continueraient à percevoir leur salaire jusqu’à nouvel ordre.
Warner Music a précisé que la suspension de son activité s’étendait aux investissements, aux projets en développement, et à toutes les actions de promotion et de marketing en cours. "Nous continuerons à remplir nos obligations convenues envers notre personnel, nos artistes et nos auteurs-compositeurs du mieux que nous pouvons au fur et à mesure que la situation évolue”, précise son communiqué. Comme ses deux consoeurs, Sony Music continuera à payer ses employés en Russie, et s’est engagée à soutenir des actions humanitaires en faveur des victimes de cette guerre.
“Nous ne distribuerons plus aucune nouveauté aux DSP russes, comme Yandex, VKontakte et Zvooq, a déclaré Andrew Bergman, PDG de Downtown Music Holdings.
D’autres acteurs mondiaux majeurs de l’industrie musicale, qui ne sont pas pour autant des majors, comme le suédois Kobalt et l’américain Downtown Music Holdings, ont suivi ou précédé ce mouvement de retrait. Le groupe suédois Kobalt - qui réunit dans son giron l’éditeur Kobalt Music Publishing, la société de perception des droits AMRA, et le véhicule d’investissement dans le rachat de catalogues Kobalt Capital - a indiqué qu’il apporterait son soutien à toute initiative visant à couper la société de perception et de répartition des droits russe RAO du réseau mondial des SPRD, ce qui priverait ses sociétaires de tout revenu en provenance de l’international.
“Nous ne distribuerons plus aucune nouveauté aux DSP russes, comme Yandex, VKontakte et Zvooq, a déclaré Andrew Bergman, PDG de Downtown Music Holdings, qui est la maison mère de l’éditeur Downtown Music Publishing, de la société de gestion des droits voisins Downtown Neighbouring Rights, ainsi que du service d’administration des droits Songtrust. Nous mettrons fin à toutes les activités locales de collecte de redevances d'édition musicale et nous exclurons la Russie de toutes les licences de synchronisation mondiales”.
L’agrégateur numérique indépendant français Believe adopte pour l’instant une attitude plus réservée."Nous suivons la situation de très près car elle ne cesse d'évoluer. Notre priorité a été d'assurer la sécurité de nos équipes et celle de leurs familles dans la région, et nous avons immédiatement fait un don pour aider la population ukrainienne. Ensuite, nous avons travaillé avec nos équipes pour adapter notre activité au respect des sanctions internationales", a indiqué à Music Business Worldwide un de ses porte parole, qui a ajouté que la compagnie “suit l’évolution de la situation de près”.
“BMI a suspendu ses paiements de représentation des droits d'auteur à la RAO, la société de perception russe pour les œuvres musicales”, a annoncé la société d’auteurs américaine dans un communiqué.
Malgré les appels lancés par des personnalités du secteur de l'édition musicale, la CISAC (Confédération internationale des sociétés d’auteurs-compositeurs) n'a pas exclu la RAO de son réseau mondial1, ce à quoi la société d’auteurs britannique PRS For Music a réagi unilatéralement en début de semaine, déclarant “officiellement suspendue, avec effet immédiat, sa relation de représentation des droits avec la RAO […], en attendant sa désolidarisation du gouvernement russe et des personnes et sociétés figurant sur les listes de sanctions".
La société d’auteurs américaine BMI s’est engagée sur une voie similaire : "BMI a suspendu ses paiements de représentation des droits d'auteur à la RAO, la société de perception russe pour les œuvres musicales. Nous collaborons en outre avec la CISAC dans le cadre d'un effort plus large pour aider les créateurs ukrainiens et des régions avoisinantes, tout en apportant une aide humanitaire à ceux qui en ont si désespérément besoin", a t-elle indiqué dans un communiqué. La SIAE, société italienne de perception et de répartition des droits d'exécution publique, a elle aussi suspendu ses paiements à la RAO.
De nombreux éditeurs américains ont cessé de délivrer des licences de synchronisation incluant la Russie, ont par ailleurs confirmé des sources à Variety. A défaut d’exclure la RAO de ses membres, la CISAC a annoncé le 9 mars qu'elle lançait un fonds de soutien aux victimes de la guerre en Ukraine approuvé par son conseil d'administration. En France, la Sacem n’a pour l’instant publié aucun communiqué faisant part de ses intentions.
“Nous ne ferons plus la promotion de spectacles en Russie, et nous ne ferons plus affaire avec elle”, a indiqué le numéro un de la promotion de concerts Live Nation.
Sur le terrain du spectale vivant, le numéro un mondial de la promotion de concerts Live Nation, qui dispose d'un bureau à Moscou depuis le début des années 2010, a annoncé dans un communiqué : "Live Nation se joint au monde entier pour condamner fermement l'invasion de l'Ukraine par la Russie. Nous ne ferons plus la promotion de spectacles en Russie, et nous ne ferons plus affaire avec elle. Nous sommes en train de passer en revue nos fournisseurs afin de cesser de travailler avec ceux qui sont basés en Russie."
À une échelle individuelle, nombre d’artistes annulent leurs concerts en Russie à un rythme soutenu. Le rappeur russe Oxxxymiron a annulé six concerts à guichets fermés à Moscou et Saint-Pétersbourg en signe de protestation, tandis que d'autres artistes internationaux, comme Green Day, Health, Nick Cave, Franz Ferdinand, AJR, Louis Tomlinson, Yungblud, The Killers, Iggy Pop ou Bring Me The Horizon, ont annulé l'étape russe de leur tournée mondiale ou leur prochaine apparition au Park Live Festival de Moscou.
"Nous pensons qu'il est essentiel d'essayer de maintenir notre service opérationnel en Russie afin de permettre la circulation mondiale de l'information", a communiqué Spotify, qui n’en a pas moins fermé ses bureaux sur place.
Du côté des plateformes de streaming, Spotify a fermé ses bureaux en Russie, où elle est présente depuis plusieurs années, pour une durée indéterminée - et décidé de restreindre la possibilité de découvrir des contenus détenus et exploités par des médias russes affiliés à l'État, supprimant tous les contenus de Russia Today et Sputnik de son inventaire de podcasts dans l'Union européenne et sur d'autres marchés. Pour autant, la compagnie ne désactivera pas son service de streaming en Russie : "Nous pensons qu'il est essentiel d'essayer de maintenir notre service opérationnel en Russie afin de permettre la circulation mondiale de l'information", a t-elle justifié.
Apple a suspendu la vente de ses produits en Russie et bloqué l'accès aux médias d'État Russia Today et Sputnik à partir de son App Store en dehors du pays. Amazon a annoncé une série de limitations visant la Russie et la Biélorussie qui concernent l’ensemble de ses services. “Nous avons suspendu les expéditions de produits aux clients établis en Russie et en Biélorussie, et nous n’accepterons plus de nouveaux clients dans ces pays pour nos services Amazon Web Services [AWS] ni de nouveaux revendeurs tiers. Nous suspendons également l’accès à Amazon Prime Video en Russie”, indique l’entreprise dans un communiqué.
avec variety.com, rollingstone.com, volumeutah.com, musicbusinessworldwide.com
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A défaut d’exclure la RAO de ses membres, la CISAC a annoncé le 9 mars qu'elle lançait un fonds de soutien aux victimes de la guerre en Ukraine approuvé par son conseil d'administration.