Bilan décennal des trois majors de la musique
Au premier semestre 2021, le chiffre d'affaires des trois majors de la musique a été deux à deux fois et demi supérieur à celui qu'elles ont enregistré sur la même période dix ans en arrière.
Le chiffre d'affaires d'Universal Music Group au premier semestre 2021 (à hauteur de 3,8 Md€) est plus de deux fois supérieur (+ 105,6 %) à celui réalisé il y a dix ans par le numéro un mondial de la musique sur le premier semestre 2011 (1,8 Md€), au plus fort de la crise du disque. Le périmètre comptable n'est certes plus le même - du fait de l'intégration, notamment, de la majeure partie des actifs d'EMI rachetés en 2012. Mais les revenus annuels d'Universal Music n'ont cessé de progresser depuis 2014, passant de 4,56 à 7,43 Md€ en 2020 (+ 62,9 %).
Le constat est le même pour Warner Music Group, dont le périmètre comptable a également varié entre temps, avec notamment l'intégration du label Parlophone racheté en 2013 : le chiffre d'affaires de la major au premier semestre 2021 (2,59 Md$) est quasiment le double de celui enregistré au premier semestre 2011 (1,3 Md$), et ses revenus trimestriels n'ont cessé de croître sur un an depuis fin 2015, à l'exception notable des deux premiers trimestres de 2020. Alors qu’ils étaient de 3,02 Md$ en 2014, les revenus de Warner Music ont atteint 4,46 Md$ en 2020 (+ 47,6 %).
La démonstration est encore plus édifiante pour Sony Music, dont le chiffre d’affaires au deuxième trimestre 2021 (le premier de son exercice fiscal 2022) est presque 2,5 fois supérieur (254,8 MdY) à celui enregistré au deuxième trimestre 2011 (109,6 MdY). Sur une base annuelle, les revenus de Sony Music n’ont cessé de croître depuis son exercice 2014 (clos le 31 mars 2014), passant de 4,5 à 8,5 Md$ selon les conversions de Statista (+ 88 %). Le rachat d’EMI Music Publishing en 2018, principal changement de périmètre comptable sur la période, ne suffit pas à expliquer cette hausse.
Dans un article publié fin 20201, l’universitaire croate Joško Lozić établit que, sur la période de 2013 à 2019, la croissance moyenne annuelle du chiffre d’affaires de Sony Music a été de 9,9 %, et celle de Warner Music de 8,8 %. Seule Universal Music, avec une croissance moyenne annuelle de ses revenus de 6 %, se situe en deça de celle enregistrée sur la période par le marché de la musique dans sa globalité (+ 6,5 %).
Malgré la forte volatilité de leurs résultats opérationnels, la croissance du chiffre d’affaires des majors s’est également traduite par une hausse de ces derniers - de + 65,6 % pour Sony Music sur la période 2016 - 2020 ; de + 89,47 % pour Warner Music sur la période 2013 - 2019 - et donc de leur rentabilité. Universal Music, de son côté, a vu la croissance annuelle moyenne de son EBITA (+ 9,9 %) surpasser celle de ses revenus sur la période 2012 - 2019 (+ 6 %). La tendance est à une croissance exponentielle de son EBITA ces trois dernières années : + 18,2 % en 2017 ; + 18,5 % en 2018 ; + 24,6 % en 2019. Entre 2012 et 2019, il a progressé de près de 120 %.
Joško Lozić voit dans la montée en puissance du streaming (+ 44 % de croissance moyenne annuelle entre 2013 et 2019) la principale raison de cette embellie du volume d’affaires et de la rentabilité des majors, cette dernière étant notamment liée, selon lui, à la baisse du coût des revenus que le streaming induit.